Les sentinelles de la RSE
Marc Dumon, le maître de l’oxymore
« Je jette mes mégots dans la rue, je trie très peu, je n’ai pas du tout l’âme d’écolo : je ne dois pas être le bon exemple ‘développement durable’… » explique Marc Dumon, délégué régional de l’ANFH, l’association nationale pour la formation des personnels hospitaliers. Pas le bon exemple, Marc Dumon ? Le maître de l’oxymore, plutôt. Il porte l’égalité hommes/femmes à l’école de Rennes, s’engage sur la qualité de vie au travail, dans la construction d’un hôpital HQE…
À 20 ans, celui qui se décrit comme « un fainéant avec quelques capacités » devient fonctionnaire des postes. Il travaille dans les wagons postaux, la nuit, découvre l’exigence organisationnelle, l’esprit de service, la solidarité. Il y restera cinq ans. En 1992, cependant, il reprend les études à Sciences-po Paris, prépare l’ENA, et finit par entrer à l’ENSP (actuelle EHESP) à 30 ans. Il y trouve sa place : « Il n’y a pas de plus bel endroit que l’hôpital public. On y fait de la technologie médicale, du bâtiment, du traitement des déchets, de l’énergie, on y construit une vision de la médecine… Il n’y a pas de plus beau métier. ». Il est DRH au CHU de Nîmes, puis de Narbonne, et s’engage dans ce qui est alors un beau projet : l’ANFH. Créé en 1974 après les lois Delors qui structure la formation, l’ANFH sanctuarise de l’argent pour financer la formation. « Aujourd’hui, 98 % des hôpitaux y adhèrent et nous versent 2,9 % de la masse salariale pour la formation du personnel. Le secteur de la santé est un lieu d’apprentissage permanent où théorie et pratique sont indissociables. » En 2007, Marc Dumon devient responsable de l’ANFH en PACA.
Pas de déclic « développement durable », pour cet homme qui estime que cette philosophie globale est extrêmement naturelle : « Ma grand-mère avec son potager était plus développement durable que beaucoup d’entre nous… Et dans les années 70, les hôpitaux psychiatriques avaient leur propre ferme et vivaient en autosuffisance sur un certain nombre de choses. Aujourd’hui, on a besoin de 10 ingénieurs pour faire du circuit-court. » Pour Marc Dumon, le développement durable est le juste retour de balancier de la dictature des experts. « C’est l’application du bon sens. Il faut accompagner les hôpitaux sur ces sujets. » Vision à long terme, voire visionnaire : d’après Marc Dumon, l’hôpital du futur sera beaucoup plus plastique, constitué de blocs de plateaux techniques transportables et adaptables. « Les hôpitaux sont d’énormes structures de béton, alors qu’ils doivent être flexibles ! Il faut faire bouger les lignes sur le télétravail, les organisations, la télémédecine. Le monde va changer très vite ces prochaines années. » Avec son équipe au sein de l’ANFH-PACA, Marc Dumon a développé 8 « Serious Games » et travaille depuis dix ans sur la qualité de vie au travail.
C’est aujourd’hui sur le management et l’intelligence collective que l’ANFH accompagne les hôpitaux, basé sur la méthode d’« Appreciative Inquiry » développée à Cleveland. Sa conclusion ? « Dans le camp des directeurs d’hôpitaux un peu atypiques, je tiens une petite place. » Dans le camp des visionnaires, plutôt.
Propos recueillis par Véronique Molières – https://www.bvm-communication.com/