Les Sentinelles de la RSE / Agence Primum non nocere
Élise veut refaire de l’alimentation, un soin
Hippocrate disait que l’alimentation est le premier médicament. Depuis quatre ans, Élise Scarpati se fait le serment de réveiller chez les professionnels de la santé, le souvenir de cette maxime du philosophe grec, considéré comme le père de la médecine. Bien sûr, comme ses collègues consultants chez Primum Non Nocere, son accompagnement, polymorphe, ausculte aussi bâtiment, eau, énergie, gestion du personnel des établissements qu’elle suit, dans l’optique du développement durable. Mais en décortiquant l’assiette des patients, la jeune femme a réalisé combien le bon sens est denrée rare au chevet des malades. Une restauration devenue prestation hôtelière, dépendante du bon vouloir de prestataires, eux-mêmes sous la coupe de gros groupes. Des commandes quasi imposées, au nom du rendement. Un principe de précaution au détriment du plaisir de manger…
« L’alimentation n’était plus du tout vue comme un soin. On en était même venu à des aberrations. Imposer systématiquement des régimes sans sel ou pour diabétiques à des personnes en fin de vie ou en gériatrie. Quand cela n’a plus de conséquences sur la santé. Juste pour se protéger d’une éventuelle erreur ou d’un problème avec le médecin ». Élise constate des dénutritions, dues au manque d’appétence de la part des personnes âgées.
Alors, elle entreprend de modifier, en douceur, le contenu du plateau-repas, de convaincre des bienfaits de la chrononutrition, c’est-à-dire donner à manger au bon moment. Elle préconise, par exemple, d’enrichir la soupe du soir de gruyère, crème fraîche ou de fromage fondu, au lieu d’un dîner complet. « Les personnes âgées ont rarement faim le soir et on leur propose entrée, plat de résistance avec féculents et légumes, fromage, deux desserts… Même à la maison, on ne mange pas comme cela. Cela finit par les dégoûter. »
« Je me sens utile tout simplement »
Quand elle arrive à infiltrer des légumes bio dans les menus, à rendre son appétit à une mamie, ou son nom à la « chambre 22 côté fenêtre ». Quand une femme de ménage n’a plus d’allergie parce que sa direction a cessé d’acheter les produits nocifs signalés par la consultante, Élise est heureuse. « J’ai l’impression d’être utile. » Elle fait ce job pour cela, améliorer les relations humaines, les conditions de travail des salariés, protéger la planète, les populations, les oiseaux, les fleurs… Elle sourit : « Je suis un peu idéaliste. » Sa famille lui reproche parfois de faire passer les autres avant elle. « J’ai des valeurs humanistes assez fortes, reconnait-elle, Je suis très empathique, toujours soucieuse des gens autour de moi ». Et de souffler comme si c’était un gros défaut : « J’aime faire le bien ».
Elle est passée il y a quatre ans de l’autre côté du miroir, après 5 ans dans la qualité des services puis dans la gestion des risques, au sein de cliniques et d’hôpitaux. Un responsable lui demande un jour de mettre en place une norme environnementale européenne. La révélation. Elle découvre Primum non Nocere dans foulée. Quand l’agence recrute, Élise lève la main. La lourdeur et les méandres administratifs commençaient à lui peser, qui la freinait pour mettre en place des actions concrètes.
« Aujourd’hui, je conseille des gens qui étaient à ma place de qualiticienne, et je comprends leurs contraintes, leurs préoccupations. Je travaille avec tous les corps de métiers des établissements sanitaires et comme je viens de l’extérieur, cela libère leur parole. On est vraiment acteurs avec les cellules décisionnaires et quand on est suffisamment convaincant, on peut les emmener encore plus loin que prévu ».
« Il faut une grande capacité d’écoute avant tout »
Tata, fille d’un directeur d’établissement médico-social puis pour handicapés, et d’une maman directrice de crèche, petite sœur de deux grands frères qui jouent encore le rôle de coach, Élise applique dans sa vie privée cette approche bienveillante, attentive, jamais trop intrusive, encore moins autoritaire.
« Il faut avant tout une grande capacité d’écoute. Si on balance notre savoir, cela ne marche pas. Il faut amener les gens à se poser des questions, à trouver les solutions. Nous ne faisons que les aider à les mettre en place en leur donnant des outils ».
Et quand la puissance de l’argent menace un peu plus la planète, que son poumon brûle en Amazonie, que les lobbys obscurcissent l’avenir, elle regarde sa nièce de six ans. Qui enseigne à ses parents le recyclage appris avec la maîtresse. Elle reprend confiance. Les protecteurs du monde à venir sont assis sur les bancs des écoles.
Propos recueillis par Annick Koscielniak, Journaliste.