Les sentinelles de la RSE
Prévention perturbateurs endocriniens !
Enfant, elle voulait être docteur mais c’est la biologie qu’elle choisit. Si elle n’était pas sûre d’être faite pour être médecin, la biologie ne faisait aucun doute :
« elle avait beaucoup de sens pour moi ».
Après une maîtrise de biologie, Claire Morisson rentre dans une école d’ingénieur agronome à Rennes où elle découvre la biologie au sens environnemental, éco-système.
« L’agronomie m’a apportée une plus grande connaissance de la culture, du sol et de leurs liens, la façon dont on pouvait cultiver, les impacts que l’on pouvait créer par nos modes de vie. Le sol est un monde assez intriguant auquel on ne s’intéresse pas assez. C’est passionnant ! »
Elle pense un moment à la recherche mais a vent d’une école, celle de la Santé Publique à Rennes. Pourquoi alors ne pas relier son bagage biologique et environnemental avec ses anciens amours, la santé, en faisant une année de spécialisation vers un diplôme d’ingénieur du génie sanitaire ?
« J’ai toujours été persuadée que, lorsque l’on s’occupe de santé humaine, il faut regarder son environnement ».
C’est une autre découverte, celui du monde de la prévention et de la promotion de la santé qui va la passionner et dans lequel elle va s’engager.
Après deux années dans une direction départementale des affaires sanitaires et sociales, elle poursuit sa carrière à la direction régionale de l’environnement à Rennes pendant six ans, ce qui lui permet de travailler sur la question de la qualité de l’eau.
« Les signaux environnementaux devraient déjà nous suffire pour interpréter beaucoup de choses. La question environnementale, l’intégration dans un écosystème a toujours été prégnante dans mon raisonnement ».
Après son parcours breton, elle retrouve ses racines en Nouvelle Aquitaine. À l’ARS Bordeaux, le défi se nomme qualité de l’air, intérieur, extérieur ! La cible ? Les biocides, les perturbateurs endocriniens !
« Avec un petit enfant, on se questionne sur tous les produits, des crèmes aux couches, le concernant ».
En 2014, lorsque le gouvernement français adopte la première stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, Claire Morisson propose une stratégie visant les plus vulnérables, les femmes enceintes et les enfants. Elle monte des programmes de promotion de la santé. L’objectif ? Mettre en place une politique spécifique à ces questions de réduction d’exposition à ces substances chimiques chez les petits, les enfants sont plus contaminés que les adultes, chez les femmes enceintes et, bien sûr, sensibiliser tous les professionnels qu’ils sont amenés à rencontrer, médecins, infirmières, puéricultrices, assistantes maternelles, etc. La première cible, les maternités. Et ça marche ! Des ateliers de prévention permettent de sensibiliser sur des choses très concrètes : des gestes simples avant la conception, dans l’idéal, pendant la grossesse et après, dans la maternité, dans le lieu d’accueil de l’enfant, à la maison, à l’école… Expliquer les risques, apprendre à distinguer les composants dangereux sur les étiquettes, conseiller d’autres produits comme la cosmétique bio, donner un petit éclairage…
« J’ai pu financer le projet, des réseaux se sont mis en place, des experts ont répondu présents. C’est magique ».
Si parfois la lourdeur peut être épuisante, les résultats s’affichent dans de nombreuses maternités, certaines sont mêmes innovantes, comment ne pas s’enthousiasmer lorsque une ingénieure qualité du Centre hospitalier de Guéret a l’idée de fabriquer un prototype de valise en bois pour que les animatrices des ateliers santé-environnement puissent y mettre leur matériel, qu’elle fasse concevoir ce prototype par des lycéens et designer ce prototype par des étudiants ?
« Ça me donne envie de continuer ! »
« Les sage femmes ont fait un travail remarquable. Elles ont pris possession de ce sujet. Nous avons embarqué beaucoup de maternités. Le travail sur les crèches où les enfants séjournent longtemps, est également important. De nombreux outils ont été élaborés et nous préparons une action auprès des assistantes maternelles pour les bons gestes réflexes à la maison. »
Si Claire Morisson a appris à travailler dans l’urgence, elle garde un peu de temps pour l’écriture et la musique. Le rêve aussi :
« je rêve de jouer du piano, j’apprends tout doucement, je progresse ».
Amoureuse du piano, de Belle-île qu’elle découvre en 1996, deux amours qui seront au cœur de son premier roman publié en 2009 et qui aura le Prix littéraire Saint-Estèphe. Mais amoureuse également de la batterie « un instrument génial », de Yann Tiersen, de Nick Cave… Sans oublier la guitare avec laquelle elle s’accompagne. Et oui, Claire Morisson est « Jade » lorsqu’elle chante en trio. Entre folk jazz et chanson française. Avec son parcours, cette ingénieure du génie sanitaire avait un profil atypique. Elle confirme !
Propos recueillis par Véronique Molières