Les Sentinelles de la RSE / Agence Primum non nocere
Agathe, toujours tournée vers les autres
Ses parents auraient pu l’appeler Tourmaline, s’ils avaient suivi la couleur de ses yeux bleu gris. Mais ils jugèrent sans doute, Agathe, prénom un peu plus aisé à porter. Elle aurait pu devenir médecin, si les maths ne lui avaient pas posé problème. Elle n’aurait peut-être jamais quitté ses deux terres d’enfance entre Normandie et Bretagne, si l’appel des voyages ne l’avait poussée à traverser l’Atlantique.
La vie emprunte les chemins du hasard mais Agathe n’imaginait pas que son avenir professionnel tracerait une telle tangente entre le Québec et une petite ville du sud de la France. « Je devais faire ma troisième année de Sciences Po à l’étranger. J’avais choisi un organisme à but non lucratif à Montréal , Synergie Santé Environnement, et voilà qu’au bout du monde, on me parle de la seule agence en France qui reliait santé et développement durable, ce que je rêvais d’associer ». De retour au pays, la jeune femme part en quête de son Graal. En mai 2018, elle décroche un stage chez Primum Non Nocere. Depuis septembre 2018, à 25 ans, elle y est gestionnaire de label HQSE (haute qualité sociale et environnementale) . La jeune femme fronce un peu le nez. « C’est dangereux pour moi ce job car je ne me vois pas travailler ailleurs ».
Sa vie converge depuis longtemps entre santé et environnement. Enfant, mademoiselle casse-cou connaît un peu trop le chemin des urgences. Son frère diabétique de type 1, beaucoup trop les chambres d’hôpital. « En plus mon père était infirmier dans l’armée. Tout ceci a alimenté mon désir de mieux connaître ce milieu, peut-être pour tenter de le changer ». Papa et maman ouvrent ensuite une boulangerie pâtisserie bio. Les enfants poussent sur le terreau de la protection de la planète, d’une alimentation saine et des gestes élémentaires écologiques.
« Une boule de nerf qui se mets la pression »
Au moment de choisir les études, ce sera Sciences Po mais dans le cursus de développement durable. Diplômée en concertation et en prospectives, elle intègre le monde professionnel de la santé. Elle tente une incursion dans un gros centre hospitalier universitaire, chargée de mettre en place une politique de développement durable. Elle s’éreinte sur la lourdeur administrative de la fonction publique, se heurte au manque de temps pour installer des actions, à l’isolement aussi.
« Ici, les décisions importantes sont prises de manière collective et pas unilatérale, avec des cercles de gouvernance partagée sur des sujets spécifiques, comment améliorer l’accompagnement de nos clients par exemple… ». Ici aussi, Agathe découvre un nouveau type de management. Peu ou pas de hiérarchie, des horaires souples, un rien déstabilisant au début, cette absence de cadre. Derrière le sourire d’Agathe, se cache une jeune femme angoissée de ne pas être à la hauteur, de décevoir. Une boule de nerf, dit-elle, qui se met la pression pour obtenir la reconnaissance…et la sienne avant tout. Insomniaque, du moins avant. « Depuis que je n’ai plus la hantise du réveil loupé, le matin, j’ai réduit à 70% mes insomnies, c’est assez incroyable ». Les 30% restant, elle compte bien les neutraliser bientôt. « J’essaie d’être tournée vers les autres au maximum ». Le calendrier de l’avent collectif, les bonnets tricotés au profit des petits frères des pauvres, c’est elle. « C’est une manière de créer du liant dans l’équipe ».
« Un peu de ma Bretagne, le soleil en plus »
Débarquée dans le midi, Agathe a perdu ses amis d’enfance et de fac. Alors les collègues ont remplacé les potes étudiants. Ils lui font découvrir les plages du littoral et sa petite préférée, Portiragnes Ouest. « Un peu de ma Bretagne, le soleil en plus ». Elle veut se mettre à la planche à voile, au piano et à l’escalade. La région regorge de spots dans le Caroux ou l’Espinouse. « Ce qui me plaît outre la sensation vertigineuse, c’est la confiance que l’on place en l’autre, en celui qui nous assure ».
Quand elle ne court pas les plages et bientôt les falaises, Agathe crée, fabrique, bricole, dessine, peint et concocte ses produits d’entretien ménager et quelques cosmétiques basiques. La faute à ces perturbateurs endocriniens qu’elle traque désormais sur les étiquettes. Elle confesse pourtant un gros défaut, la cigarette. Arrêter de fumer figure parmi la vingtaine de post it collés à son bureau. Ses petites cases à elle, son îlot qui lui permet de garder bien sur terre, ses pieds, toujours nus, à la Robinsonne.
Propos recueillis par Annick Koscielniak, Journaliste.